Un jardin d’agrément, paysagé peut-il être un lieu d’accueil de la biodiversité ? Cette idée n’est pas si étonnante lorsque sont mis en place les bons aménagements et préconisées les bonnes pratiques. Le réseau des « Jardins de Noé » l’illustre parfaitement, et en particulier le Jardin d’En Galinou, qui a servi de support de réflexion aux paysagistes de l’UNEP.
Jardin
Remarquable à plus d’un titre, le Jardin d’En Galinou situé dans le Lauragais
est le fruit du travail de longue haleine de deux passionnés. Leur
philosophie ? Un jardinage adapté au jardin, à son climat, à son sol et
ses particularités et non l’inverse. Et surtout, laisser du temps au temps. En
résulte un jardin où rien n’est laissé au hasard, où massifs et rocailles
alternent avec pré, mare bassin et verger. Un jardin bien jardiné qui met en
place l’ensemble des gestes de la Charte des Jardins de Noé et qui est aussi un
refuge LPO, notamment pour les faucons crécerelles qui apprécient nicher dans
le garage de l’ancienne ferme.
C’est en partant de cet exemple
plus que probant que les membres de l’UNEP ont pu échanger sur les questions de
biodiversité au cours de deux ateliers animés par Noé. L’objectif de ces deux
ateliers était de montrer que le jardin écologique met en avant la technique et l’esthétique.
Une haie monospécifique de thuya peut ainsi être simplement remplacée, progressivement ou non, par une haie champêtre, qui gardera sa fonction de clôture ou lisière visuelle tout en étant riche de ressources pour la biodiversité. Des zones de prairies de fauche peuvent aussi constituer un véritable aménagement paysager, délimitant différentes zones et usages au sein du jardin. Une rocaille, si elle est faite de pierre sèche et sans liant imperméable, devient un refuge et un lieu de chasse pour la faune locale. La pratique même du paysagiste rassemble ainsi un large panel d’outils pour la préservation et même la restauration de la biodiversité.
Les
paysagistes ont aussi un rôle à jouer dans la conservation des essences
végétales et l’adaptation des territoires face au changement climatique. En
choisissant une palette végétale adaptée aux particularités du jardin (nature
du sol, exposition, …) et de son territoire (climat, hydrométrie,), ils
assurent la durabilité du jardin et ainsi une gestion facilitée pour les
propriétaires. A En Galinou, la palette végétale a été sans cesse adaptée pour
convenir au mieux au lieu et à la réalité de son climat. Ce qui n’empêche pas
les essences plus ornementales, mais toujours locales, de se développer à
loisir.
La question du changement
climatique est souvent revenue dans les discussions autour des ateliers
présentés par Noé aux membres de l’UNEP. Si les études sur le sujet de l’adaptation
des végétaux à ce changement commencent à se multiplier, les observations sur
le terrain ne sont pas toujours concluantes, et difficiles à coupler avec le
besoin de favoriser les essences locales. En effet, si le label Végétal Local
aide à s’assurer de la bonne provenance des végétaux, il s’appuie sur des
découpes régionales dont certaines ne seront plus pertinentes en terme de
climat d’ici quelques années. La
vigilance et l’approfondissement continu des connaissances sur le sujet sont
ainsi de mise.
Un
autre défi des paysagistes est de convaincre clients mais aussi salariés de
passer à une pratique plus favorable à la biodiversité. De nombreux préjugés
circulent en effet sur la gestion écologique des jardins, et notamment chez les
particuliers. L’aspect supposé inesthétique des jardins à la gestion moins
lourde est généralement le plus gros frein rencontré par les paysagistes.
Pourtant, le jardin d’En Galinou ainsi que le nombre croissant de jardins
écologiques labellisés Remarquables, montrent tout le contraire. Un paysagiste
ayant une bonne connaissance de la biodiversité proposera à ses clients des
aménagements techniques, esthétiques et favorables à la biodiversité. Il n’est
par ailleurs souvent pas plus coûteux d’entretenir un jardin écologique. Les
gestes et techniques sont simplement à adapter. C’est d’ailleurs un aspect à
favoriser auprès de ses équipes qui peuvent craindre une diminution du
savoir-faire mis en œuvre. La fauche des prairies ou la création d’une mare en
argile demandent la maitrise de techniques particulières qu’il peut être
intéressant de valoriser par une entreprise.
Par ailleurs, avoir pensé et mis en place ces aménagements et techniques dès la conception du jardin, assure ensuite une gestion écologique plus facile à mettre en place et des aménagements plus durables dans le temps. Un jardin conçu pour être géré écologiquement le sera d’autant plus facilement.
Ainsi, en zone urbaine où le réensauvagement des espaces verts est difficile, les paysagistes ont un rôle à jouer pour la protection et même la restauration de la biodiversité. Les aménagements paysagers peuvent assurer la reconstitution de petits réservoir de biodiversité ou des pas japonais, complétant les trames vertes et bleues. La technicité des paysagistes et des entreprises du paysage peut être un outil pour la fonctionnalité des écosystèmes. C’est avant tout la connaissance de la biodiversité et des écosystèmes qui leur permettra d’adapter les aménagements en faveur de la biodiversité et plus généralement d’une gestion raisonnées des jardins et espaces verts.