La joie de la pluie

Accouplement de Crapaud commun dans l'eau Lorraine France © Robin Monchâtre / Biosphoto

Mission forêt : les amphibiens, des animaux vulnérables

                  À travers son Observatoire de la Biodiversité des Forêts, Noé vous propose de découvrir le monde des amphibiens en partant à la recherche de certaines espèces. Longues salamandres, petites grenouilles et gros crapauds : Pourquoi ces animaux vivent-ils entre terre et eau ? Quelle est leur place dans la dynamique des espèces et comment les observer ? Voici une présentation de cette classe de vertébrés à la peau brillante.

Salamandre tachetée sous la pluie - Vosges du Nord France

© Emmanuel Baechler / Biosphoto

29 novembre 2022

Particularités de l’anatomie des amphibiens

Le terme d’amphibien désigne des organismes qui vivent « entre deux vies », les vies terrestre et aquatique. On les appelait autrefois les batraciens. Au cours de l’évolution, ce sont les premiers vertébrés à être sortis de l’eau pour conquérir la terre ferme et à adopter les quatre pattes. Ils ont réussi cette prouesse en changeant de corps au cours de leur croissance. En effet, la métamorphose est l’étape clef de leur développement, ils passent du corps d’un organisme aquatique à celui d’un organisme terrestre : les branchies deviennent des poumons, et les nageoires se transforment en pattes articulées, rebondissantes.

   

Étapes de la métamorphose d’une rainette verte (Hyla arborea) © Bruno Guénard, Thomas Marent / Biosphoto

   

Les amphibiens peuvent être divisés en plusieurs groupes, dont les anoures et les urodèles. Les anoures regroupent les grenouilles et les crapauds, c’est-à-dire les amphibiens sans queue, qui avancent par petits sauts et nagent la brasse. Les urodèles sont les salamandres et les tritons. Ils sont sourds, marchent à quatre pattes et nagent comme un chien avec leurs pattes ou comme une anguille en repliant leurs pattes le long de leur corps.

La peau des amphibiens est particulière, elle est adaptée à la vie aérienne et aquatique. Elle est recouverte d’un mucus comme la peau des poissons et possède de la kératine comme celle des mammifères, afin d’éviter la déshydratation de leur corps. Ce mucus est le fruit de la sécrétion de deux types de glandes : les glandes muqueuses, qui se focalisent sur des molécules assurant l’isolation thermique et le maintien de l’hydratation, et les glandes granuleuses ou parotoïdes, plus grosses et symétriques, qui sécrètent le venin. Cette toxicité leur permet de se protéger des prédateurs. Par exemple, le mucus de la salamandre tachetée provoque une paralysie et des contractions incontrôlables de la mâchoire des animaux qui tentent de la mordre, ce qui lui permet de se libérer. Les amphibiens sont plus ou moins toxiques. Leurs sécrétions sont souvent ciblées contre leurs prédateurs spécifiquement.

   

Salamandre tachetée et limace © M. Grenet & A. Soumillard / Biosphoto

   

Tout comme les poissons, les amphibiens possèdent une ligne latérale le long de leur corps qui leur permet de détecter les mouvements dans l’eau, là où la vision est moins utile.

 

Comportement et modes de vie

Les amphibiens sont des carnivores, tant les adultes que les larves. Ils sont des chasseurs de proies, dont la taille dépend des espèces. Sur terre, la chasse se fait à partir de la détection des mouvements. Une fois la proie trouvée, elle est attrapée à même la mâchoire. Sous l’eau, les proies sont détectées par les vibrations de l’eau et les molécules présentes dans l’eau, laissées par les autres organismes. En ouvrant leur mâchoire, un mouvement d’aspiration est créé et la proie est aspirée directement par le batracien.

Ce sont des animaux le plus souvent nocturnes, ils sont très sensibles à la déshydratation et à la lumière du soleil. On observe dans leur rythme de vie une alternance entre phase aquatique et phase terrestre. La phase terrestre a lieu hors des périodes de reproduction, leur peau est plus épaisse pour limiter les pertes d’eau. La phase aquatique se fait pendant les saisons chaudes, où ils profitent de l’eau pour maintenir leur température corporelle et assurer la naissance d’une nouvelle génération.

    

La reproduction a donc lieu dans l’eau. Les anoures ne s’accouplent pas à proprement parler. Les mâles attirent les femelles par leur chant. Lorsqu’ils se retrouvent, ils mettent leurs aisselles en contact et lâchent simultanément les ovules et les spermatozoïdes dans l’eau. C’est une fécondation externe, qui a lieu à l’extérieur des corps des parents. Les têtards sont donc indépendants de leurs parents dès leur éclosion, et parfois dès la ponte des œufs. Les mâles alytes sont une exception : ils portent leurs œufs, les maintenant humides en les arrosant, jusqu’à l’éclosion des têtards.

   

Crapaud accoucheur (Alytes obstetricans), espèce en danger, portant ses œufs © Quentin Martinez / Biosphoto

   

Chez les urodèles, les mâles utilisent des spermatophores, des capsules contenant les spermatozoïdes. Lors de l’accouplement, la fécondation peut être externe ou interne, selon si le spermatophore est libéré dans l’eau ou à l’intérieur de la partenaire. Dans ce cas, les œufs éclosent à l’intérieur de la mère, où les têtards commencent à se nourrir. La mise-bas a souvent lieu au moment de la métamorphose. Si la mère participe à la nutrition de ses têtards, on parle de viviparité. Si elle ne les aide pas et qu’ils se nourrissent de ce qu’ils trouvent dans son corps, on parle d’ovoviviparité. Les petits des Spélerpès de Strinati, du sud de la France, sont une exception : la mère garde ses œufs jusqu’à leur éclosion. Les petits se métamorphosent dans l’œuf, et lors de l’éclosion, des versions miniatures des adultes en sortent.

   

Femelle spélerpès de strinati gardant ses œufs © Fabio Pupin / Biosphoto

   

Quelques conseils pour les observer

Les amphibiens sont des animaux qui affectionnent les lieux humides, les mares, les étangs, les ruisseaux et les fossés. Sortir au crépuscule ou à la nuit tombée vers ces zones peut aider à les observer. Leur taille est très variable, certaines espèces sont plus petites qu’un ongle, d’autres mesurent une quinzaine de centimètres.

Pour bien identifier les individus, les photos de vues dorsale et latérale sont très utiles. La position et la proéminence des glandes parotoïdes et des verrues sont de bons indicateurs. Une prise de vue avec le détail de l’avant du corps facilite également l’identification, la forme et la couleur des pupilles peut être un caractère déterminant.

Dans le cas des anoures, il est parfois possible de les identifier grâce à leur chant. Ils sont parfois très discrets et difficiles à trouver. Ce n’est pas le cas des urodèles, qui ne chantent pas étant donné qu’ils sont sourds.

   

Si les amphibiens ne sont pas toxiques pour les humains, il est interdit de les manipuler, ce sont des espèces protégées. Ce sont des animaux qui ont la peau fragile, dénudée d’écailles ou de poils. Des populations entières ont été ravagées depuis les années 1990 à cause de la prolifération d’un champignon parasite de leur peau, Batrachochytrium dendrobatidis. 

Ce champignon se dépose sur la peau des amphibiens via l’eau et les décompose vivants. Il a infecté des espèces en dehors de son aire de répartition originale à cause du commerce mondial d’espèces sauvages. Les populations qui ne connaissaient pas ce parasite ne pouvaient pas savoir comment s’en défendre, et les espèces les plus fragiles ont subi de lourdes pertes. Manipuler ces animaux peut être dangereux pour nous tout comme pour eux.

   

                  La population générale de batraciens est mise en danger à cause de la destruction de leurs habitats. Les risques sont l’assèchement et l’urbanisation, qui réduisent considérablement la surface et la quantité d’espaces humides. La pollution des eaux est une autre menace pour ces espèces. Certaines constructions humaines coupent les voies de migration des groupes, les autoroutes et les voies ferrées par exemple. (plus d'informations sur la migration des amphibiens) Plusieurs systèmes sont mis en place localement pour limiter la disparition de populations complètes qui auraient essayé de traverser la chaussée, par exemple en mettant en place des fossés et des barrières sur le bord de la route, pour que les animaux tombent dedans. Le lendemain matin, des bénévoles locaux viennent récupérer les individus pour les déposer de l’autre côté de la route. Il peut également y avoir des crapauducs, tunnels creusés sous la route que peuvent emprunter les batraciens. 

   

Crapauduc, France © Fabio Pupin / FLPA - Frank Lane Picture Agency / Biosphoto

   

L’observatoire vous propose en ce moment de partir à la recherche de la Salamandre tachetée, un urodèle à la peau noire aux taches jaunes. Elle peut être trouvée à la nuit tombée, en climat humide, après un épisode pluvieux par exemple. Pour plus d’informations sur cette espèce, vous pouvez consulter sa fiche ici. Les observations sont recensées via l’application INPN espèces, disponible sur IOS et Android.

   


Sources :

·       Amphibia. Wikipedia France, consultés le 21/11/2022

·       Lescure, J. De Massary, J-C. Oger,F., 2010. Atlas des amphibiens et reptiles de la Seine-Saint-Denis. 144p.

·       Baudin, B., 2010. Amphibiens et reptiles de la Mayenne. 184p.

·       Site web de l’association BUFO https://www.bufo-alsace.org

·       Scaleux, A., - Un champignon parasite décime les amphibiens du monde entier https://www.nationalgeographic.fr/animaux/un-champignon-parasite-decime-les-amphibiens-du-monde-entier consulté le 29/11/2022

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