Pourquoi les papillons se retrouvent piégés par les lampadaires ?
Après avoir étudié près de 477 vidéos de 10 ordres d’insectes différents et volants autour d’une lampe artificielle (à la fois sur le terrain et en captivité), des chercheurs ont démontré, en analysant la trajectoire des vols en 3D, que les insectes adoptent un comportement d’inclinaison dorsale face aux sources de lumières.
Ce phénomène permet de comprendre pourquoi les insectes volants se retrouvent piégés lorsqu'ils croisent le chemin d’une lampe : Lors du vol au-dessus d’une source lumineuse, les insectes sont entraînés vers le sol pour ajuster leur position par rapport à la lumière.
Une fois retrouvés sous cette lumière, les insectes se redressent au-dessus, pour adapter leur position. Étant donné qu’ils volent constamment le dos incliné vers la lumière, cela provoque leur mise en orbite autour des sources de lumière artificielles, en répétant continuellement le même schéma.
La pollution lumineuse
Avec une consommation en énergie non négligeable, les lumières artificielles représentent non seulement une source de pollution atmosphérique conséquente mais également une pollution lumineuse dangereuse puisqu’elles perturbent le rythme et le comportement de la faune nocturne.
En France, on recense d’ailleurs près de 11 millions de points lumineux.
Protéger les insectes nocturnes
Pour protéger les insectes nocturnes, des mesures de prévention contre la pollution lumineuse existent et sont sources de nombreuses études. Des scientifiques de l’université libre de Berlin ont notamment souligné l'importance de l’orientation des lumières artificielles. Ceux-ci ont équipé des boucliers sur des lampadaires au sein de plusieurs sites municipaux ainsi que d’un parc naturel en Allemagne, afin de rendre les sources de lumière presque invisibles en dehors des zones illuminées.
A l’aide de Luxmètres, de spectromètres et d’une caméra calibrée pour les mesures de luminance, les chercheurs ont réalisé un échantillonnage mensuel des insectes troublés par les lumières. Ces analyses ont montré une réduction significative de la perturbation des insectes.
Au total, 1 553 insectes ont été capturés sur les sites municipaux en une année, et 7 240 insectes sur le site du parc naturel en quatre ans.
En comparant le nombre total d'insectes échantillonnés sur les sites municipaux à proximité des éclairages, les chercheurs ont retrouvé deux fois plus d’insectes attirés par l'éclairage conventionnel que par les lampadaires adaptés et protégés.
Concernant le site du Parc Naturel, ils ont observé 5,4 fois plus d’insectes attirés par les LED conventionnelles par rapport à l’obscurité. L’installation de lampadaires adaptés et protégés a réduit cette attraction à 1,3 fois plus d’insectes capturés par rapport au témoin dans l'obscurité.
Ce constat souligne le potentiel immense de l’éclairage spatialement optimisé pour diminuer l’impact écologique de la pollution lumineuse, sans compromettre la sécurité humaine.
Partant du principe d’orientation de la lumière vers le sol, la charte d’éclairage développée par Noé en 2020 suggère de supprimer les émissions de lumière vers le ciel. En effet, en intégrant ces solutions dans les politiques d’éclairage, notamment à proximité des zones protégées, nous pouvons espérer protéger les écosystèmes et préserver la biodiversité nocturne.
Le 24 Mai dernier, la métropole de Montpellier a notamment signé la charte de l’éclairage durable de Noé, proposant des engagements à tenir pour respecter la biodiversité nocturne.
La charte encourage par exemple à adapter la temporalité de l'éclairage aux besoins réels, à privilégier les couleurs de lumière les moins impactantes et moins puissantes ou encore à inventorier la biodiversité nocturne pour mieux la prendre en compte.
Aujourd’hui, les organismes de protection et de restauration de la biodiversité tel que l’OFB (l’Office Français de la Biodiversité) travaillent pour créer des continuités sur le territoire et des liens entre les habitats, communément appelées “trames écologiques”.
Favoriser l’éclairage durable permettrait d’augmenter les espaces accueillant la biodiversité nocturne et contribuerait à une meilleure connectivité entre les habitats.
L’adhésion à la charte de Noé sur l’éclairage durable est une des mesures possibles pour prendre part à la création de trames noires en France métropolitaine.
Pour consulter la page Nuits de Noé, cliquez ici
Pour consulter la Charte de l’éclairage nocturne durable, cliquez ici
Références bibliographiques
- Nature Communications, ST. Fabian, YSondhi, PE. Allen, Jamie C. Theobald et H Ti Lin. Publié le 30/01/2024 : "Why flying insects gather at artificial night" (consulté le 25/06/2025)
- Communications Biology, M Dietenberger, A Jechow, Gr Kalinkat, S Schroer, B. Saathoff & F. Hölker. Publié le 31/05/2024 : "Reducing the fatal attraction of nocturnal insects using tailored and shielded road lights" (consulté le 01/07/2024)
- Radiance light trance, cartographie représentative de la pollution lumineuse dans le monde (consulté le 5/07/2024)
- Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Publié le 23/08/2019 : "Pollution lumineuse" (consulté le 08/07/2024)