Depuis cet été, ce ne sont pas que les véhicules de la Réserve de Termit et Tin-Toumma au Niger qui sillonnent cette immense aire protégée de 86 215 km², mais aussi 6 dromadaires. Basés au Camp Mena, la base vie de la réserve, ils sont montés par des agents communautaires, issus des populations locales. On les appelle alors, des « patrouilles méharistes », « méhari » signifiant « dromadaire de selle » en Afrique du nord.
Martin Hochart, Directeur de cette réserve, nous en parle.
Faut-il des qualifications spécifiques pour être méhariste ?
Pour être « méhariste » il faut simplement savoir chevaucher des dromadaires. Au sein de la réserve, seuls les agents d’origine Toubou, Peul ou Touareg savent le faire. Nous avons donc prévu des formations pour les agents lutte anti-braconnage (LAB) d’origine Kanouri ou Zarma qui représentent la majorité de nos effectifs, pour qu’ils puissent aussi patrouiller avec ces montures.
Le dromadaire est un animal en partie sauvage, très vif, et possède une mémoire d’éléphant. Il faut être ferme et attentif lorsqu’on le chevauche. Si quelqu’un le frappe, il faut ensuite qu’il évite de passer derrière lui, car ce dernier n’oubliera pas, et le gratifiera, dès qu’il pourra, d’un coup bien placé.
Qui s'occupe des dromadaires et comment se déroulent les patrouilles ?
Nous avons un chauffeur d’origine Toubou qui s’occupe également des dromadaires. Il connaît parfaitement le désert, accompagne les progressions dans le massif de Termit, et se charge de nourrir les animaux pendant les canicules (avril, mai, juin) avec du tourteau (mélange de mil et autres céréales trempées dans de l’eau). Le reste du temps les dromadaires mangent la végétation environnante, comme les feuilles d’acacias, sur leur route. Chaque méhariste est également responsable de sa monture et doit aller la chercher le matin, si elle s’est éloignée pendant la nuit.
Une patrouille dans le désert se déroule donc en forme d’étoile, avec l’eau au milieu et parfois de la nourriture également. Généralement cette dernière est plutôt portée sur le dromadaire.
Quel est l’avenir de ces patrouilles ?
Pour le moment nous ne disposons que de 6 dromadaires. Nous avons comme objectif de former plus de méharistes, nous doter de plus de montures, et accroître le nombre de patrouilles dans la réserve, qui est l’une des plus grandes aires terrestres protégées au monde.
Pourquoi avoir fait le choix d’organiser des patrouilles « méharistes » ?
Le dromadaire a plusieurs atouts, il est appelé le vaisseau du désert. Il permet d’aller loin, lentement mais sûrement. Il est évidemment plus écologique et économe en termes énergétiques. À titre d’exemple, nos véhicules consomment 20-25 litres / 100 km sur sol dur, et 30-35 litres dans le sable fin du désert.
Le dromadaire a juste besoin que des points stratégiques soient prévus pour le dépôt d’eau cachée et enterrée dans le sable. Les méharistes y passent régulièrement abreuver leurs montures. En période chaude un dromadaire peut ne pas boire durant 5 jours et jusqu’à plus de 10 jours en saison plus fraîche. Toutefois, cet animal reste à surveiller en période de canicule, car ici les 46°C ont été très souvent dépassés.
De plus, cet animal est perçu comme moins intrusif par la faune sauvage, qui se laisse donc plus facilement observer.