le long de la pente

Petite tortue sur Buddleia © Caroline Bureck / Biosphoto 

Les causes du déclin des papillons

Quand on parle de biodiversité, on désigne l’ensemble des êtres vivants, des milieux qu’ils occupent et de leurs interactions. La biodiversité ordinaire est en danger, principalement en conséquence des actions humaines. Notre objectif est de parvenir à la conserver un maximum et de limiter sa régression. 

Hespérie des cirses (Pyrgus cirsii) espèce vulnérable © Silvia Reiche / Biosphoto

04 janvier 2023

Si la disparition des espèces est un phénomène naturel, la fréquence à laquelle elle survient de nos jours ne l’est pas. Cette accélération de la disparition des espèces est un phénomène qui s’est développé au cours du dernier siècle, si bien qu’aujourd’hui, elles disparaissent à un rythme bien plus élevé qu’elles n’apparaissent. Ce déséquilibre représente un véritable danger pour la stabilité des écosystèmes et la santé des populations mondiales.

  

Les insectes et notamment les papillons sont principalement touchés. Il est difficile de quantifier les dégâts qu’ils subissent, tant ces espèces sont discrètes. C’est pourquoi les programmes de suivi sont très importants pour récupérer ces informations. Ainsi, en Europe, on constate une régression de 39% de l’abondance des papillons de prairies de 1990 à 2017. 

  

Dans le cadre de l’Opération papillons, nous vous demandons de recenser certaines espèces de papillons que vous voyez dans vos jardins afin de pouvoir caractériser l’impact d’activités humaines sur les populations et surveiller leurs dynamiques. 

Nous vous proposons de découvrir dans cet article les causes de la régression des papillons à travers le territoire.

  

Les lépidoptères peuvent être atteints à plusieurs échelles, suite à des pratiques les visant directement, visant leur plante-hôte, indispensable à leur développement, ou encore suite à une dégradation de leur milieu de vie.

  

La plante-hôte est l’objet de la ponte des œufs : les chenilles vont s’en nourrir dès leur éclosion. Elle peut être le support de la chrysalide quand vient la métamorphose. - Si la quantité et la qualité des plants diminue à un endroit donné, les populations devront se déplacer afin d’en trouver d’autres. C’est un phénomène parfaitement naturel à l’origine de certains comportements. La migration des Belles-Dames par exemple, se fait progressivement en suivant ses plantes-hôtes, dont font partie les chardons, lorsque le climat ne permet plus leur croissance. Cependant, lorsque la plante-hôte est endommagée de façon non naturelle, de nombreuses espèces ne peuvent pas s’adapter à leur disparition soudaine.

  

Risques chimiques : pollution chimique, pesticides

Les insecticides touchent sans surprise les papillons, à l’état de chenille, de chrysalide et d’imago. La pollution à l’azote, issu principalement des élevages intensifs et des véhicules, a également un impact négatif : elle change la composition des sols. Les plantes sont alors moins diversifiées, certaines espèces spécialisées des sols pauvres   sont « chassées », entrainant la disparition des papillons qui leur sont liés.

  

Les pratiques de désherbage chimique, la pollution des eaux peuvent également atteindre les plantes-hôtes. 

  

Traitement chimique illégal d’une bordure, Charmois, Franche-Comté, France © Dominique Delfino / Biosphoto

  

           
Dégradation des habitats : pratiques agricoles, pollution lumineuse

L’Homme est la principale cause de cette situation, les avancées technologiques du siècle dernier ont pour conséquences sévères ce qu’on constate de nos jours :

  • L’urbanisation et la bétonnisation des territoires, supprimant des habitats. De manière générale, les habitats peuvent être détruits par divers procédés : arasement de talus, coupe de haies, comblement des fossés, tonte, déboisement, plantation de résineux, mise en place de paysages artificiels introduisant des espèces exogènes, incinération… On observe un déclin particulier des papillons dans les prairies, les zones humides et les forêts, qui sont l’habitat d’espèces spécialistes. Les espèces qui ont un habitat plus adaptable sont capables de se réfugier ailleurs.
  • Certaines pratiques agricoles, comme le gyrobroyage et l’uniformisation des parcelles et les monocultures, réduisent considérablement l’épanouissement de la biodiversité. Ceci peut être limité en mettant en place des haies, refuges écologiques. Le gyrobroyage est également responsable de la destruction de chrysalides attachées aux plantes, de chenilles s’en nourrissant et des supports de repos et de ponte des adultes.
  • La pollution lumineuse est une cause encore globalement ignorée d’atteinte à la biodiversité. Toutes les espèces se reposent sur un rythme circadien pour réguler leur organisme. Ce rythme étant en partie dicté par l’alternance du jour et de la nuit, une lumière constante le perturbe.

  

    Plantations de riz en Camargue, papillons attirés par une lampe © Régine Rosenthal, Joël Héras / Biosphoto
      
  • Le trafic routier est également dangereux, tant pour les espèces rampantes et terrestres qu’aériennes. La circulation entraîne de nombreuses victimes. De plus, la mise en place de voies de circulation à grande vitesse, automobiles ou ferroviaires, morcèle les habitats, on parle de fragmentation.

  

Risques écologiques : Espèces invasives

D’après le ministère de la transition écologique : « une espèce exotique envahissante est une espèce introduite par l’homme volontairement ou involontairement sur un territoire hors de son aire de répartition naturelle, et qui menace les écosystèmes, les habitats naturels ou les espèces locales. » Ce terme désigne donc les espèces, qui sont capables de proliférer dans un milieu d’où elles ne sont pas originaires, au détriment des espèces indigènes.

   

Au cours de l’évolution, les espèces se sont différenciées en s’adaptant à un climat et des espèces spécifiques. Ainsi s’est construit un équilibre où les ressources sont bien partagées et où l’équilibre proies/prédateurs est stable. 

   

En introduisant des espèces dans un territoire d’où elles ne proviennent pas, plusieurs dérèglements sont engendrés. La cohabitation forcée de deux espèces qui se partagent le territoire et la source de nourriture peut être source de conflit. Il peut s’agir d’une compétition stable, mais il arrive parfois que l’espèce introduite chasse l’espèce indigène.   

   

En effet, les espèces invasives ont souvent des facilités à proliférer : elles se retrouvent dans un milieu sans prédateurs. C’est le cas du Frelon asiatique et de l’Ambroisie à feuilles d’armoise. Le Brun des pélargoniums, originaire d’Afrique australe, a été introduit par accident lors du commerce de sa plante-hôte et se plaît énormément chez nous depuis plus d’un siècle.

    

Le Buddleia de David (Buddleja davidii), est une espèce invasive de plante, originaire de Chine. Il s’agit d’une plante très appréciée pour ses inflorescences colorées, et qui se développe sur les sols pauvres en matière organique, comme les friches et les zones artificielles. C’est une plante produisant beaucoup de nectar, et attirant de nombreuses espèces de papillons. Cependant, la plupart des chenilles ne peuvent pas se nourrir de ses feuilles. Dans les terrains, elle remplace peu à peu les plantes-hôtes mais ne permet pas aux papillons d’assurer la prochaine génération. 

   

Belle-Dame (Vanessa cardui) sur un Buddleia (Buddleja davidii) © Wim Verhagen / Biosphoto

   

Changement climatique

Le changement climatique est une autre des raisons principales de la régression des espèces. Si les papillons sont mobiles et peuvent se déplacer en suivant le climat, les plantes-hôtes ont plus de mal à s’adapter. C’est pourquoi les changements de conditions climatiques, les températures extrêmes, les périodes de sècheresse ou d’inondation et les climats violents sont très dangereux. Ils touchent les papillons et leurs plantes-hôtes. 

   

Les espèces réagissent différemment aux changements de climat. Les espèces thermophiles en profitent pour étendre leur aire de répartition vers le Nord et coloniser de nouveaux espaces. Les espèces préférant les climats froids, en revanche, sont contraintes de se réfugier en altitude, ou de fuir le territoire. 

   

Ce qu’on peut faire à notre échelle

L’Opération papillons permet de suivre certaines espèces dans des espaces que l’on peut adapter à leurs besoins : dans les jardins, les balcons et les terrains privés, nous avons l’occasion de créer un espace accueillant et propice au développement d’un écosystème, quand tant d’autres sont mis en danger.

   

Depuis le lancement de l’Opération papillons, les données récoltées dans les jardins particuliers ont montré que ces lieux étaient des espaces refuges pour les espèces des milieux urbains. En effet, ils sont riches en plantes à nectar dont ont besoin les papillons pour se nourrir. Il est également notable que l’usage de pesticides et d’herbicides dans un jardin est dévastateur pour les populations.

   

Nous pouvons rendre nos terrains accueillants pour les espèces en plantant des végétaux indigènes, des plantes à nectar, en n’utilisant pas de pesticides, en mettant à disposition des abris et des corridors écologiques. Ce sont des pratiques que de nombreux participants à l’Opération adoptent au fur et à mesure de leurs observations !

En cette saison, on peut réaliser des préparatifs pour l’hiver : laisser à leur place les éléments dans les jardins qui peuvent être des abris, comme des tas, des pots, des caisses en bois, éviter de remuer la terre. De nombreuses espèces hivernent, se cachent pour l’hiver dans des recoins ou enfouies dans le sol plus ou moins profondément. Ici, des conseils pour préparer son jardin pour la saison froide.

   

Par ailleurs, vous pouvez toujours renseigner vos observations pendant l’hiver. Nous aurons bientôt un retour sur la saison 2022 !

   


   

Sources :
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